mardi 3 juin 2014

Le conflit Chine/ Vietnam (juin 2014)



SAMIR AMIN            (juin 2014)
Le conflit Chine/ Vietnam
Je ne peux, aujourd’hui, que reprendre ce que j’avais déjà dit il y a plusieurs années, m’adressant à des responsables politiques en Chine et au Vietnam, auxquels je tenais exactement le même discours :
« Si j’étais Président du Vietnam ou de la Chine – et vous voyez que cette  probabilité étant nulle, mes propos sont sans conséquence – je ferai la chose suivante. Je dirai : nous, ensemble, Vietnamiens et Chinois – contrôlerons cette Mer que nous appellerons la Mer du Sud, sans la qualifier davantage (comme on dit « le Golfe » pour éviter de le qualifier d’arabe ou d’iranien). Nos deux marines de guerre y patrouilleront ensemble. Un haut officier vietnamien sera embarqué sur chaque navire chinois et vice versa. Nous interdirons aux intrus – le Japon et les Etats Unis - de s’y faire voir. Et puis, pour ce qui est de l’exploitation des ressources de la Mer, nous constituerons une Haute Commission chargée d’en définir les formes et les conditions. J’ajoute que la responsabilité de la Chine dans toute cette affaire est majeure. C’est la Chine qui est le partenaire fort dans la région. C’est à elle de faire les premiers pas, voire des concessions, pour permettre que s’ouvre une véritable négociation entre les deux pays, et faire échouer toute tentative des impérialistes nord-américains et japonais de tirer profit de cette querelle. La priorité dans nos politiques doit être donnée à la construction d’un front commun des nations du Sud face à l’impérialisme».
Je n’attendais pas de réponse ; et je n’en ai pas eue. Mais je pouvais lire sur les visages dans les deux pays : cet homme est un rêveur ; il manque de réalisme. Ma conclusion : Oui, les hommes de pouvoir, encore aujourd’hui et partout, se pensent réalistes, mais leur realpolitik ne l’est pas. Le réalisme, c’est être révolutionnaire, agir pour changer les choses et renforcer le front commun des peuples du Sud.

lundi 2 juin 2014

الانتخابات الأوروبية خطوة نحو انهيار الاتحاد الأوروبىEUROPEAN ELECTIONS arabic



سمير أمين
الانتخابات الأوروبية خطوة نحو انهيار الاتحاد الأوروبى

نشر فى : الخميس 29 مايو 2014 - 5:10 ص | آخر تحديث : الخميس 29 مايو 2014 - 5:10 ص

1 ـ تم تصميم البناء الأوروبى من أجل إدامة الليبرالية الاقتصادية غير المقيدة. وكما قال جيسكار ديستان بعد التوقيع على معاهدة ماسترخت (1992) «الاشتراكية الآن غير مشروعة». وكان هذا البناء غير ديمقراطى منذ البداية؛ فهو يحرم البرلمانات المنتخبة من أى أمل فى أن يسمح لهم الخروج من إملاءات بروكسل البيروقراطية غير المنتخبة. ومع ظهور الاحتكارات ذات التمويل المعولم، أصبح الاتحاد الأوروبى أداة السلطة الحصرية الاقتصادية والسياسية ـ فى يد الأقلية الصغيرة.
2 ــ غير أن هذا النظام الليبرالى المتطرف غير قابل للتطبيق. حيث يعتبر دافعه الوحيد إدامة تركيز الثروة والسلطة بلا نهاية؛ على حساب فرض التقشف المستمر على الأغلبية، وتدهور الخدمات العامة، والعجز المالى المتزايد، بل والركود. ولن يمكن أن يستمر الاستثناء (ألمانيا اليوم) إلا بقدر تقبل الآخرين لمصيرهم المحزن. وليس هناك معنى لشعار «افعلوا مثل ألمانيا» حيث لا يمكن استنساخها.
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3 ـ وتعكس الانتخابات الأوروبية الحالية فى مايو 2014 رفض الأغلبية فى أوروبا «تلك»، حتى لو كان الناس لا يدركون أنه ليس من الممكن إيجاد «أوروبا أخرى». فقد امتنع أكثر من نصف الناخبين عن التصويت، وقام بالتصويت أكثر من 70٪ فى أوروبا الشرقية؛ بينما صوت 20٪ لأحزاب اليمين المتطرف الذى يعانى من رهاب الوحدة الأوروبية، وهو يسيطر فى بريطانيا وفرنسا؛ وصوتت نسبة 6٪ لليسار الراديكالى. ولكن غالبية من صوتوا لاتزال تعبر عن اعتقاد ساذج فى إمكانية إصلاح النظام، وهو الإصلاح المستحيل بفعل الدستور الأوروبى.
ولا شك أن التصويت لليمين المتطرف أمر خطير. فعادة، لا يوجه الفاشيون نقدهم إلى المسئولين عن الكارثة، وهم الاحتكارات؛ وإنما يتم نقل النقاش إلى مناطق أخرى وإلقاء اللوم على الضعفاء، أى المهاجرين! ولكن هذا الفوز المحزن ناجم على نحو كبير من عدم جرأة اليسار الراديكالى فى نقده للنظام الأوروبى وتقديم المقترحات من أجل التغيير. بل إنهم يغذون وهم الأمل فى الإصلاح.
4ــ فى كتابى «انهيار الرأسمالية المعاصرة» (2012) أوضحت أن هذا التراجع الدرامى فى أوروبا يعود إلى الثلاثينيات من القرن الماضى. وسوف يكون لدينا أوروبا «ألمانية» صغيرة، مع أشباه المستعمرات فى أوروبا الشرقية؛ وتختار فرنسا موقف فيشى وتقبل الارتباط به (ولكن مازال من الممكن فى وقت لاحق ظهور رفض ديجولى)؛ وتنأى بريطانيا بنفسها أكثر من أى وقت مضى، عن المشكلات الأوروبية، وتعمق اندماجها فى النظام الأطلسى الذى تهيمن عليه الولايات المتحدة؛ وتتردد ايطاليا واسبانيا بين التطلع إلى برلين أو السعى نحو لندن. ولا شك أن الانتخابات الأوروبية تعبر عن خطوة إلى الأمام فى هذا الاتجاه.

dimanche 1 juin 2014

The European elections, may 25; a step towards the implosion of the European Union



SAMIR AMIN, may 27th
The European elections, may 25; a step towards the implosion of the European Union
1.The European construction was conceived in order to perpetuate unconstrained economic liberalism. As Giscard d’Estaing put it after the signature of the Maestrich treaty (1992): “socialism is now illegal”. That construction was non democratic from the start; it deprives the elected parliaments from any hope to be allowed to move out of the diktats of the non elected Brussel’s bureaucracy. With the emergence of financialized globalized monopolies, the European Union has become the instrument of the exclusive economic and political power of small oligarchies.
2.Yet this extreme liberal system is not viable. Its only motive is to perpetuate the endless concentration of wealth and power. At the cost of continuous austerity for the majorities, deterioration of public services, growing financial deficits and even stagnation. The exception (Germany to day) can only be so as long as the others accept their sad fate. The slogan “do like Germany” makes no sense; it cannot be reproduced.
3.The European elections of may 2014 reflect the reject by the majorities of “that” Europe, even if the people are not aware that “another Europe” is not possible. More than half of the electorate abstained, more than 70% in Eastern Europe; 20% voted for Europhobic extreme right parties who headed in Britain and France; 6% voted for the radical left. But indeed the formal majority of those who voted still expressed their naïve belief of a possible reform of the system, a reform that the European constitution makes impossible.
The ultra right vote is dangerous, for sure. As usually fascists do not address their critique to those who are responsible of the disaster, i.e. the monopolies; they transfer the debate to other areas and blame an escape goat, i.e. the immigrants! But that sad victory is for a good part the result of the lack of audacity of the radical left in their critique of the European system and proposals for change. They irrigated the wishful thinking hope for a reform.
3.In my book “The implosion of contemporary capitalism” (2012) I have drawn the lines of that dramatic drift of Europe back to the 1930s. We would have a small “German” Europe, with the Eastern European semi colonies; France choosing a Vichy attitude and accepting to relate to it (but a later Gaullian reject remains possible); Britain more distant then ever from the European problems, deepening its integration into the Atlantic system dominated by the US; Italy and Spain hesitating between the submission to Berlin or looking toward London. The European elections express a step ahead in that direction.

Les élections européennes de Mai 2014 Nouvelles étape dans l’implosion du projet européen



SAMIR AMIN
Les élections européennes de Mai 2014
Nouvelles étape dans l’implosion du projet européen
1.        La construction européenne a été conçue et mise en œuvre dès l’origine pour garantir la pérennité d’un régime de libéralisme économique absolu. Le traité de Maastricht (1992) renforce encore ce choix fondamental, et interdit toute autre perspective alternative. Comme le disait Giscard d’Estaing : « le socialisme est désormais illégal ». Cette construction était donc par nature anti-démocratique et annihile le pouvoir des Parlements nationaux élus, dont les décisions éventuelles doivent rester conformes aux directives du pouvoir supranational défini par la pseudo-constitution européenne. Le « déficit de démocratie » des institutions de Bruxelles, à travers lesquelles opère la dictature néo-libérale, a été et demeure consciemment voulu. Les initiateurs du projet européen, Jean Monet et autres, n’aimaient pas la démocratie électorale et se donnaient l’objectif d’en réduire le « danger », celui d’engager une nation hors des sentiers tracés par la dictature de la propriété et du capital. Avec la formation de ce que j’appelle le capitalisme des monopoles généralisés, financiarisés et mondialisés, à partir de 1975, l’Union Européenne est devenue l’instrument du pouvoir économique absolu de ces monopoles, créant les conditions qui qui permettent d’en compléter l’efficacité par l’exercice parallèle de leur pouvoir politique absolu. Le contraste droite conservatrice/gauche progressiste, qui constituait l’essence  de la démocratie électorale évoluée, est de ce fait annihilé, au bénéfice d’une idéologie de pseudo « consensus ».
Ce consensus repose sur la reconnaissance par les opinions générales en Europe que les libertés individuelles et les droits de l’homme sont garantis, au moins dans la majorité des Etats européens sinon dans ceux de l’ex Europe orientale, mieux qu’ailleurs dans le monde. C’est exact et à l’honneur des peuple concernés. Néanmoins la double dictature économique et politique des monopoles généralisés annihile la portée de ces libertés, privées de leur capacité de porter en avant un projet de société qui transgresserait les limites imposées par la logique exclusive de l’accumulation du capital.
Par ailleurs l’unité européenne a été popularisée avec l’argument alléchant que celle-ci conditionnait l’émergence d’une puissance économique égale à celle des Etats Unis et autonome par rapport à celle-ci. Mais en même temps la constitution européenne combinait les adhésions à l’Union Européenne et à l’OTAN, en qualité d’allié subalterne des  Etats Unis. Le nouveau projet d’intégration économique atlantique devrait dissiper les mensonges de cette propagande : le marché européen sera soumis aux décisions du plus fort, les Etats Unis. Adieu l’indépendance de l’Europe !
2.        Mais le régime économique libéral absolu, imposé par la constitution européenne, n’est pas viable. Sa raison d’être exclusive est de permettre la concentration croissante de la richesse et du pouvoir, au bénéfice de l’oligarchie de ses bénéficiaires, fût-ce au prix d’une austérité permanente imposée aux classes les plus nombreuses, à la régression des acquis sociaux, voire au prix de la stagnation économique. La spirale infernale de l’austérité produit pour l’ensemble européen la croissance permanente des déficits et de la dette (et non leur réduction comme le prétend la théorie économique conventionnelle, sans fondements scientifiques). Les exceptions (l’Allemagne aujourd’hui) ne peuvent l’être que parce que les autres sont, eux, condamnés à subir leur sort. L’argument avancé – « il faut faire comme l’Allemagne »  – n’est pas recevable : par sa nature même le modèle ne peut pas être généralisé.
Néanmoins le pouvoir absolu exercé par les monopoles généralisés et l’oligarchie de leurs serviteurs ne permet pas sa remise en cause par les « opinions générales ». Ce pouvoir absolu est déterminé à défendre jusqu’au bout et par tous les moyens ses privilèges, ceux des oligarchies, seules bénéficiaires de la concentration sans limite de la  richesse.
3.        Les élections européennes de mai 2014 traduisent le rejet par la majorité des citoyens de « cette Europe » (sans nécessairement être conscients que « l’Europe » ne peut être autre). Avec plus de la moitié d’abstentionnistes dans le corps électoral (plus de 70% d’abstentions dans l’Est européen), 20% de votes en faveur de partis d’extrême droite se déclarant « anti-européens », les listes dites « europhobes » en tête en Grande Bretagne et en France, 6% en faveur de partis de la gauche radicale critique de Bruxelles, cette conclusion s’impose. Certes, en contrepoint, la majorité de ceux qui ont participé au vote, se réclament toujours du (ou d’un) projet européen, pour les raisons données plus haut (« l’Europe garante de libertés et des droits ») et parce qu’ils pensent encore – avec beaucoup de naïveté – qu’une « autre Europe » (des peuples, des travailleurs, des nations) est possible, alors que la construction européenne – en béton armé – a été conçue pour annihiler toute éventualité de sa réforme.
Le vote de défiance d’extrême-droite porte en lui des dangers qu’on ne doit pas sous-estimer. Comme tous les fascismes d’hier, ses porte-paroles ne mentionnent jamais le pouvoir économique exorbitant des monopoles. Leur prétendu « défense de la nation » est trompeuse : l’objectif poursuivi est – outre l’exercice de leur pouvoir dans les différents pays concernés de l’Union Européenne – le glissement de l’Union Européenne de son régime actuel administré par la droite parlementaire et/ou les sociaux-libéraux à un régime nouveau géré par une droite dure. Les débats sur les origines véritables de la dégradation sociale (précisément le pouvoir des monopoles) sont transférés vers d’autres domaines (l’exploitation du bouc émissaire de l’immigration en particulier).
Mais si ce succès douteux de l’extrême droite « anti européenne »  est celui qu’il est, la faute en revient à la gauche radicale (à gauche des partis du socialisme ralliés au libéralisme). Par son manque d’audacité dans la critique de l’Union Européenne, par l’ambiguïté de ses propositions, qui alimentent l’illusion de « réformes possibles », cette gauche radicale n’est pas parvenue à faire entendre sa voix.
4.      Dans le chapitre intitulé « L’implosion programmée du système européen » (in, L’implosion du capitalisme, contemporain, 2012), je dessinais les lignes générales de la dégradation programmée de l’Union Européenne. On aura alors une petite Europe allemande (l’Allemagne, agrandie par ses semi-colonies d’Europe orientale, allant peut-être jusqu’à l’Ukraine), la Scandinavie et les Pays Bas attelés à cette nouvelle zone mark/euro ; la France ayant choisi son adhésion « vichyste » à l’Europe allemande (c’est le choix des forces politiques dominantes à Paris), mais peut-être tentée plus tard par un renouveau « gaulliste » ; la Grande Bretagne prenant ses distances et affirmant encore davantage son atlantisme dirigé par Washington ; la Russie isolée ; l’Italie et l’Espagne hésitant ente la soumission à Berlin ou le rapprochement avec Londres. L’Europe de 1930, ais-je alors écrit. On y va.